L’Acte Uniforme OHADA portant organisation des Sûretés (AUS) du 15 Décembre 2010, entré en vigueur le 16 M ai 2011 présente les dispositions communes aux gages avec et sans dépossession, avec les éléments constitutifs tels que les droits sur la chose gagée, l’obligation de conservation de la chose jugée, l’ordre de préférence en cas de gages successifs.
L’article 104 de l’AUS , nous présente trois modes de réalisation du gage : la vente forcée, l’attribution judiciaire qui étaient déjà connues sous l’empire de la précédente version de l’AUS et auxquelles vient aujourd’hui s’ajouter le Pacte Commissoire, sous certaines conditions. Les parties peuvent convenir d’un mode de réalisation dès la signature du contrat de gage ou décider de laisser au créancier gagiste une option entre les trois modes de réalisation au moment de la réalisation.
LE PACTE COMMISSOIRE, UN INSTRUMENT DE SURETES ANCIENNEMENT INTERDIT INTRODUT DANS L’ACTE UNIFORME REVISE SUR LES SURETES OHADA
Le concept de pacte commissoire auquel fait allusion le législateur OHADA dans l’Acte uniforme portant organisation des sûretés du 15/12/2010 remonte à la Rome Antique. On le définissait comme « une convention conclue entre un débiteur et un créancier et par laquelle, ils conviennent que le bien gagé deviendra la propriété du bénéficiaire en cas de non paiement à échéance de la dette consentie ».
Au regard de cette conception Préhistorique, il semble que les Pères du pacte commissoire tenaient à dynamiser le Gage, en facilitant sa réalisation au moyen de cette convention. Cependant, ce concept de réalisation conventionnelle a été critiqué, d’où sa prohibition. En effet, le débiteur concédant généralement concomitamment au bénéfice du crédit, le gage, on craignait de le voir soumis à la loi du plus fort par certains « prêteurs sans scrupules», désireux de profiter de sa situation critique pour lui imposer un pacte commissoire et le spolier du bien grevé d’une valeur généralement supérieure au montant de la créance. Cette raison va amener l’Empereur CONSTANTIN en 326 après J.C. à interdire le pacte commissoire.
Après les invasions barbares, le pacte commissoire fit son retour jusqu’à sa prohibition à nouveau par le Pape INNOCENT III en 1198. Cette interdiction passée dans l’Ancien Droit dès le 16e siècle fut consacrée dans le code civil de 1804. Dès lors, les pays de tradition civiliste tel que le QUEBEC et certains pays africains, en occurrence les pays membres de l’OHADA où le code civil de 1084 était en vigueur, ne pouvaient que prohiber ce pacte dans leur droit commun des contrats conformément à l’article 2078 du code civil qui disposait alors que : « Le créancier ne peut, à défaut de paiement, disposer du gage ; sauf à lui à faire ordonner en justice que ce gage lui demeure en paiement et jusqu’à due concurrence, d’après une estimation faite par experts, ou qu’il sera vendu aux enchères.
Toute clause qui autoriserait le créancier de s’approprier le gage ou en disposer sans formalités ci-dessus est nulle ». Mais, cette situation s’est progressivement adoucie pour être définitivement ignorée. En effet, sous l’influence des intérêts et exigences de l’économie contemporaine, notamment l’efficacité dans la réalisation des sûretés réelles, la jurisprudence a amorcé un mouvement de reconnaissance du pacte commissoire. A plusieurs reprises, elle a validé les pactes commissoires postérieurs à la conclusion du contrat de gage ou ceux grevant les gage-espèces. A la suite de cette dynamique prétorienne, les législateurs français et OHADA l’ont successivement consacré en la forme légale le 23 mars 2006 et le 15 décembre 2010.
LA CONSECRATION LIMITEE DE L’ATTRIBUTION CONVENTIONNELLE : LE PACTE COMMISSOIRE SELON LE DROIT OHADA
Le pacte commissoire : une nouvelle modalité de réalisation des sûretés réelles :Après avoir réaffirmé dans le Traité de QUEBEC sa volonté à renforcer la sécurité juridique et judiciaire dans l’espace OHADA, le législateur OHADA précise sans toutefois le nommer dans l’article 104 alinéa 3 de l’AUS que : « … les parties peuvent convenir que la propriété du bien gagé sera attribuée au créancier gagiste en cas de défaut de paiement […] »et ce, quelle que soit la nature du bien gagé, mobilier ou immobilier.
Opportunément introduit donc par la réforme du droit des sûretés le 15 Décembre 2010, aux cotés d’autres innovations non négligeables à l’accès au crédit et à la sécurité des créanciers, le pacte commissoire s’analyse comme une modalité nouvelle dont le but est de faciliter la réalisation des sûretés réelles. Un model conventionnel, en d’autres termes une exécution forcée mais de nature privée qui s’oppose à l’exécution forcée ou à l’attribution judiciaire ordonnées par le juge.
Il serait louable pour le développement du crédit que cet instrument soit vulgarisé au regard des multiples avantages qu’il présente l’attribution conventionnelle est admise de manière différente selon que le débiteur de la créance garantie (dont il convient de rappeler qu’il peut ne pas être le constituant du gage ) est un débiteur professionnel ou non si le débiteur est un débiteur professionnel, le pacte commissoire est admis quelle que soit la nature du bien gagé.
Si le débiteur est un débiteur professionnel, le pacte commissoire n’est admis que si le bien gagé est « une somme d’argent ou un bien dont la valeur fait l’objet d’une cotation officielle » (AUS, art 104 ali. 3). Cette disposition apporte une protection efficace au débiteur particulier, supposé moins averti que le débiteur professionnel. En effet, lorsque le gage porte sur l’une de ces deux catégories de bien, le risque de spoliation susceptible de nuire à ses intérêts (s’il est également le constituant) est inexistant puisque le bien fait l’objet d’une évaluation objective et réputée certaine.
Concernant les effets de l’attribution conventionnelle, aucune estimation n’est donc requise pour un gage consenti en garanti des obligations d’un débiteur non professionnel et portant sur« une somme d’argent ou un bien dont la valeur fait l’objet d’une cotation officielle » (AUS, art 104 ali. 3). En revanche le pacte commissoire pourra porter sur tout type de biens si le débiteur est un débiteur professionnel, ce qui imposera une estimation lorsque le gage ne portera ni sur une somme d’argent ni sur un bien objet d’une cotation officielle. Comme pour l’attribution judiciaire, le bien devra dans ce cas, être évalué par un expert désigné à l’amiable ou judiciairement, sans que les parties puissent déroger cette disposition protectrice du constituant. Cette estimation ne saurait avoir pour effet de retarder le transfert de propriété au créancier, qui interviendra au jour du défaut de paiement ou à toute autre date postérieure convenue dans le contrat de gage. Le bien devra en revanche, être évalué au jour du transfert, ce qui signifie que l’expert devra se placer rétrospectivement à la date du transfert pour estimer la valeur du bien à cette date.
Comme en matière d’attribution judiciaire, le créancier gagiste devra consigner la valeur excédentaire, le cas échéant, au profit des éventuels créanciers gagistes de second rang ou la restituer au constituant à défaut de tels créanciers toute clause contraire étant réputée non écrite.